L’écriture est un sujet qui me passionne et décortiquer les processus d’écriture m’amènent à me questionner sur ma propre démarche d’écriture. C’est cette exploration à laquelle je tente d’inviter celleux qui participent aux ateliers d’écriture que j’anime à Reims et ailleurs !
Pour mon retour sur le blog (oui, ça fait un bail que je n’avais pas écrit un article ici ^^), je dois avouer que le sujet que j’ai prévu d’aborder avec vous s’est imposé ! Il y a trois semaines, j’étais en Guadeloupe, de retour sur mon île après dix longues années d’absence. Vous dire ce que j’ai ressenti quand j’ai posé les pieds là-bas m’est aujourd’hui impossible. Ce qui est sûr, c’est que dans mon corps, dans mon cœur, je le savais : je suis rentrée à la maison. J’étais de retour chez moi et ça, ça a une saveur particulière.
Durant ce séjour où j’ai été accueillie par ma cousine-sœur, j’ai pu renouer avec les lieux, avec ces parcours que j’ai empruntés si longtemps enfant ^^ Je ne saurais vous le dire précisément mais j’ai eu comme le sentiment de me ramasser.
Nombreux.ses sont celleux qui pensent que les lieux gardent trace de notre présence. J’aime à le croire aussi. Revenir sur ces chemins d’enfance, marcher dans les pas de celle que je fus jadis, actualiser ma carte mentale des transformations, des évolutions et des disparitions, tout cela a eu un effet régénérateur sur moi autant qu’il a nourri une forme de douce nostalgie, voire de tristesse. Parce qu’actualiser c’est prendre conscience de l’impermanence des choses.
Prendre conscience de sa propre impermanence
Voir ses cousines-sœurs et ses tantes vieillir, voir ses bébés de jadis être des adultes épanouis aujourd’hui, voir les arbustes de mon enfance être maintenant des arbres majestueux m’a fait prendre conscience de la fragilité de la vie et de la beauté de la vie en même temps. Cela m’a naturellement renvoyé à mes rêves de gosse, à ce que j’imaginais pour ma vie quand je serai grande ^^ Combien de ces rêves n’avais-je pas osé regarder ? Combien sont restés rangés dans le tiroir obscur de ma mémoire par crainte de ne pas pouvoir les réaliser ? De combien d’ailleurs avais-je pris la peine de prendre soin ?
En me questionnant ainsi, j’ai réalisé que pendant toutes ces années, j’avais trainé un sac de rêves en me disant que peut-être un jour, j’oserais y jeter un œil ! Mais un sac de rêves, parfois, ça pèse lourd, très lourd. Sans que l’on s’en rende compte, ce sac de rêves peut même devenir boulet.
Boulet parce que l’enfant que l’on a été avait des attentes. Moi, j’avais des attentes pour moi-même. Beaucoup. Mais, est-ce que mes attentes d’enfant étaient encore celles de l’adulte que je suis ? J’ai osé me poser cette question. J’ai osé déposer le sac de rêves par terre. Inventaire. En le déposant, j’ai réalisé à quel point il pesait lourd et j’ai eu envie/besoin de m’alléger. Alors, je l’ai ouvert ce sac de rêves. Je l’ai ouvert et j’ai regardé chacun de ces rêves d’enfant avec mes yeux d’adulte qui chemine.
Tous les rêves ne sont pas faits pour être réalisés
Avec tristesse, j’ai dû dire aurevoir à quelques-uns. Pourquoi ? Parce que ce ne sont plus mes rêves ! J’ai fait l’amer constat que certains rêves ne sont pas faits pour être réalisés. Parfois, ils sont juste là pour nous montrer le chemin, pour attiser la flamme. D’une certaine manière ils servent de carburateur. Pourtant, certain.e.s les voient comme des voitures ou des maisons et s’enferment dedans. Je me suis moi-même enfermée dans mes rêves en considérant qu’il fallait à tout prix leur donner vie et cela m’a éloignée de certaines opportunités voire m’a carrément desservie dans cette quête de mon essence. Chemin faisant, j’ai nourri des peurs qui sont devenues de plus en plus grandes. Et si je n’y arrivais pas. Et si je n’étais pas capable d’y arriver. Tel était le mécanisme en branle ici qui, jour après jour après jour, a terni la confiance que j’avais en moi-même.
Et puis un jour, faire le deuil
Prendre conscience de tout cela a été source d’une grande tristesse autant qu’il a été libérateur. Mes rêves ne définissent pas qui je suis parce que je suis plus que mes rêves. Et c’est là où je fais le lien avec l’écriture. Parfois on se fait une idée de ce que l’écriture devrait être. On y projette alors tout un tas d’attentes qui peuvent être très éloignées de qui on est.
Ce n’est pas parce qu’on aime un.e auteurice qu’on doit écrire comme iel ! Peut-être qu’iel écrit comme iel écrit parce qu’il a nourri des rêves, qu’iel en a laissé aller quelques-uns et que c’est la combinaison de tout cela qui permet de donner naissance à cette écriture-là. Peut-être aussi qu’en voulant tellement que son écriture ressemble à celle de l’autre, on se prive d’aller à la rencontre de son écriture à soi !
Je n’écrirai jamais comme Maya Angelou ou Audre Lorde ou Andrée Chedid ou Chimamanda Ngozi Adichie ou Marguerite Duras ou Lisette Lombé ou qui sais-je encore ! Jamais. C’est un fait. Est-ce que cela veut dire que mon écriture est moins flamboyante ? Est-ce que cela veut dire que mon écriture est moins nécessaire ?
Faire le deuil de ce qui ne sera jamais c’est peut-être se donner l’opportunité d’attiser les braises de sa créativité et donner une chance à son feu sacré de danser joyeusement ^^
Lydie S.
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